CHRONIQUES

TRIBUNE DU VENDREDI N°37 : La célébration de la Tabaski chez les Ahloulahi

today16 juillet 2021 5

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LA CÉLÉBRATION DE LA TABASKI CHEZ LES AHLOULAHI

Au vu de toute cette frénésie avec laquelle nos concitoyens préparent la tabaski et tout le stress que cela engendre dans le cœur des pauvres « goorgoorlu » aujourd’hui, nous avons décidé de plonger dans l’histoire pour voir comment cette fête était-elle célébrée au sein de la Communauté Ahloulahi de jadis.

Dans la communauté Ahloulahi très ancrée dans les valeurs d’unité, de cohésion, de solidarité et de partage issues de l’enseignement de Seydina Limamou Lahi (asws), le 1er Khalif Seydina Issa Rohoulahi (as) et chacun de ses successeurs prenaient le soin d’acquérir plusieurs moutons pour la tabaski. Le but étant de les distribuer discrètement ensuite à la famille du saint-maître (asws), aux dignitaires de la communauté (imams, moukhadams, etc.) et aux fidèles démunis. En cela ils encourageaient les plus nantis de la communauté à copier leurs gestes en assistant les moins servis pour que toutes les familles puissent prendre part à la célébration.

Le jour de la tabaski, les fidèles hommes, femmes et enfants tous de blancs vêtus se rassemblaient en deux groupes distincts (celui des hommes séparé de celui des femmes) au lieu de prière devant le mausolée du saint-maitre (asws) en cantonnant en chœur la formule de l’unicité divine avant l’arrivée de l’Imam. Traditionnellement, l’imam du jour était l’autorité suprême de la communauté à savoir le Khalif. Après plusieurs minutes de ferveur religieuse, on pouvait apercevoir un groupe d’hommes qui arrivait au lieu de prière. Ce qui était captivant dans ce cortège, c’était la discipline et la sérénité des membres qui le composait : aucune précipitation, aucune bousculade n’était possible. Dans ce groupe, un homme sortait du lot de par sa démarche pleine de grâce et son port vestimentaire distinctif : grand boubou traditionnel couvert par un manteau sans oublier les mythiques et mystiques turbans noir et blanc qu’il portait. C’était le Khalif des Ahloulahi qu’on pouvait reconnaitre de loin sous le célèbre parasol « Liwâwul hamdi » tenu par l’éminent Cheikh Modou Mboup « Al Ghârikhou ». Le reste du groupe était généralement composé de quelques membres de la famille du saint maitre (asws), quelques imams et moukhadams et quelques chanteurs de la communauté.

Voir un descendant du saint-maitre a fortiori son Khalif venir diriger l’office du jour était un sacré bonheur mêlant un délicieux sentiment d’assurance, de sécurité et de fierté dans le cœur des fidèles Ahloulahi. En arrivant au lieu de prière, il s’asseyait quelques minutes le temps de laisser aux organisateurs le soin de vérifier que les rangs étaient bien alignés avant de prononcer la « takbîratul iqrâm » (Allâhu Akbar) marquant le début de la prière collective de Tabaski. Le premier rang derrière l’Imam était exclusivement réservé aux érudits de la communauté. Il leur était même permis de mettre un manteau de couleur au-dessus de leurs habits de couleur blanche (tel qu’il est de coutume chez les Ahloulahi). Il convient de souligner que les érudits ont toujours occupé une place très importante aux côtés des Khalifs. Du temps de Seydina Issa (as), ce sont ses jeunes frères, étant tous des érudits pluridisciplinaires à savoir Seydina Mandione (son futur successeur), Seydina Ababacar, Serigne Doun Pathé Ndoye, Elimane Mamadou Wade, etc. qui étaient généralement au premier rang juste derrière lui pendant la prière d’Eid.

À la fin de l’office couronné par le sermon qui, traditionnellement, rappelait une partie de l’enseignement exhaustif du saint-maitre (asws), les fidèles raccompagnaient le Khalif à son domicile pour effectuer le sacrifice abrahamique. Le convoi prenait alors un chemin différent de celui emprunté à l’aller. Après avoir vu le guide suprême immoler son bélier, les chefs de familles pouvaient enfin rentrer chez eux pour en faire de même. L’organisation sociale instaurée par le stratégique premier Khalif Seydina Issa Rohoulahi (as) et matérialisée par l’extraordinaire système des « ËTT » montrait alors toute sa pertinence. Seydina Issa avait organisé les localités Layènes de telle sorte que les concessions étaient regroupées en plusieurs groupes prenant chacun la forme de la lettre « U » avec une grande cour appelée « ËTT » en wolof. Le chef de « ËTT » qui, normalement occupe la concession du milieu, était un patriarche doté en sagesse et chargé de gérer les affaires liées aux familles qui composent son « ËTT». Pendant les fêtes, il se chargeait d’égorger les moutons de chaque famille et toute la viande était ensuite rassemblée puis partagée équitablement entre toutes les familles du « ËTT» de telle sorte que l’on ne sût pas réellement laquelle des familles n’a pu acquérir un bélier pour la fête. Les braves dames de chaque « ËTT» cuisinaient ensemble les repas de la fête sous la supervision de la cheftaine qui généralement était la femme la plus âgée encore en activité et la plus riche en sagesse.

Une tradition voudrait que pour chaque mouton tué le « fallaré » (ou le flanc) soit envoyé au Khalif. Et les fidèles venaient de partout, Yoff, Ngor, Ouakam, Cambérène, Thiaroye, Rufisque, Bargny etc. pour déposer leurs « fallaré » chez le Khalif. Ce dernier se chargeait ensuite de les redistribuer entre les fidèles les plus démunis pour qu’eux aussi puissent prendre part à la célébration comme tout le monde. Pour le premier jour de la Tabaski, tous les fidèles habitant à Cambérène et leurs familles respectives venaient passer la célébration à Yoff avec ceux des résidents. Et le lendemain c’était au tour des familles de Yoff d’aller passer la fête aux côtés de leurs frères et sœurs à Cambérène. Cela avait permis de mieux huiler les rapports entre les fidèles de Yoff et ceux de Cambérène autour de jumelages ayant finalement aboutit à des mariages, des parrainages etc. entre eux.

Au-delà de la communauté, l’on se rappelle des beaux béliers bien bâtis que le troisième Khalif El Hadji Seydina Issa Lahi envoyait aux différents khalifs de son époque (Cheikh Abdoul Ahad Mbacké de Touba, Cheikh Abdoul Aziz Sy de Tivaouane, Cheikh Sidy Yahya Kounta de Ndiassane, Cheikh Alpha Seck de Thiénaba, etc.) Ces derniers aussi à l’image de Cheikh Abdoul Lahad lui envoyaient plusieurs béliers pour renforcer les relations fraternelles entre les familles religieuses. À la suite du troisième Khalif, chacun de ses successeurs respectifs Seydina Mame Alassane et Seydina El hadji Abdoulaye Thiaw Lahi perpétua le geste. Tout récemment le Khalif des Tidjanes Serigne Babacar Sy Mansour a posé le même acte que son feu père Serigne Abdoul Aziz Sy Dabakh (rta) en envoyant un grand bélier à son frère Seydina El Hadji Abdoulaye Thiaw Lahi Khalif général des Ahloulahi. Un geste que nous saluons tous.

Au sein de la communauté des Partisans d’Allah, aucune forme de pression sociale ne pouvait être vraiment ressentie par les fidèles à l’approche de la fête de tabaski. Pour la simple raison que la solidarité obligatoire instaurée par le saint-maitre (asws) et renforcée par chacun de ses illustres successeurs avait fait que le bien et la richesse de l’un étaient systématiquement mis à la disposition de son prochain [moins nanti] en cas de besoin comme à l’occasion des grandes fêtes.

Nous invitons alors tous nos frères et sœurs à s’inspirer de cette forme de cohésion sociale et à renforcer cette solidarité pour le bonheur encore renouvelé de notre maître Seydina Limamou Lahi Al Moukhtâr Wa Seydil Anlamîna (asws).

Par Chérif Alassane Lahi Diop « Sibt Sâhibou Zamâne »,
Analyste politique et économique,
Expert en Commerce et Management des Affaires Internationales,
Secrétaire Général de Vision 129.

Écrit par: soodaan3

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